18 Mar

Pourquoi je sculpte une Méduse


Why Am I Sculpting a Medusa?

She is the most terrifying figure of Antiquity. She has snake-like hair and a gaze that petrifies. She is also an idea, one of the most represented characters in art, dating back 1,800 years. She remains a vivid and ever-evolving figure. The first mention of this mythological character appears in Homer’s work in the 8th century BCE, where she is referred to as the Gorgons.

She embodies the fury of war and exists at the boundary between the world of the living and the dead, evoking fear among the Greeks—just the mention of her name was enough. Yet, behind this terrifying appearance, Medusa carries a tragic story. She is one of the three Gorgon sisters—Medusa, Euryale, and Stheno—and the only one who is mortal.

Originally, she was said to be a beautiful young woman who was punished by Athena for having united with the god Poseidon (Neptune). In some versions, this union is consensual, but in Ovid’s version from the 2nd century CE, it is a rape, which changes everything. She then takes refuge in a dark cave at the edge of the world, where she is hunted down by Perseus, who beheads her and uses her head as a weapon.

Since Antiquity, this ambivalence between the monster and the feminine figure has been evident. In the Middle Ages, Medusa fades into obscurity, and the myth becomes an allegory of vice within a Christian perspective. If Medusa represents vice, then Perseus, by slaying her, embodies virtue.

During the Renaissance, Medusa’s head is emphasized in painting for its apotropaic function—that is, it wards off the evil eye and protects the one who possesses her severed head, like Perseus. Leonardo da Vinci is said to have painted two Medusa portraits, but they have been lost. Only written descriptions of these paintings remain, though they are believed to have inspired many Renaissance artists.

It was in the 19th century that the myth took a new turn. Romantics found in Medusa a symbolic conflict between the masculine and the feminine. They transformed her into the archetype of the femme fatale—seductive and, therefore, inherently dangerous to men.

In 1975, a complete reversal took place with the writer Hélène Cixous in her famous essay The Laugh of the Medusa. She challenged this traditional view, arguing that Medusa is not frightening but beautiful and smiling. She overturned the perception of Medusa as a dangerous and malevolent figure, instead making her a symbol of the struggles women face in gaining a voice in public discourse and being heard.

In 2020, Argentine artist Luciano Garabello drew inspiration from this character, sculpting a Medusa and placing it in front of the New York courthouse where Harvey Weinstein was being tried. In this inverted version, it is Medusa who beheads Perseus.

What is fascinating about Medusa is that she serves as a metaphor for the visual power of art. Just as in the myth, one cannot look at her directly—doing so would turn them to stone. The only way to perceive her is through her reflection or through artistic representation.



Pourquoi je sculpte une méduse?
C'est la figure la plus terrifiante de l'Antiquité. Elle a des cheveux de serpent et un regard qui vous pétrifie. C'est aussi une idée, un des personnages les plus représentés dans l'art et vieux de 1800 ans. C'est une figure qui est toujours aussi vivace et toujours en évolution. Alors on trouve la première mention du personnage mythologique dans l'œuvre d'Homère au VIIIᵉ siècle avant Jésus-Christ, et dans cette œuvre, elle s'appelle Gorgones.

Elle incarne la furie guerrière et elle vit à la frontière du monde des vivants et les morts, et elle suscite l'effroi chez les Grecs. Rien qu'à l'évocation de son nom. Mais derrière cette apparence terrifiante, méduse traîne une histoire tragique. Elle est l'une des trois sœurs Gorgones, Méduse, leur allié et sténo, et c'est la seule des trois qui est mortelle.


Au départ, elle est censée être une belle jeune fille qui est punie par Athéna pour s'être unie au dieu Poséidon Neptune. Et dans certaines versions, cette union avec Poséidon est consentie et dans la version d'Ovide, au IIᵉ siècle après Jésus-Christ, c'est un viol, ce qui change tout. Donc elle se réfugie dans une grotte obscure aux confins du monde, et elle est débusquée par Persée qui la décapite et qui se sert de sa tête comme une arme.

Dès l'Antiquité, cette ambivalence entre le monstre et la figure féminine est bien présente. Au Moyen Âge, Méduse est éclipsée, on en parle moins et le mythe devient une allégorie du vice dans une perspective chrétienne. Si Méduse incarne le vice, Persée, donc du coup s'en débarrassant, un quart incarne donc au contraire la vertu. Alors, à la Renaissance, la tête de Méduse est mise en avant dans la peinture pour sa fonction apotropaïque, c'est à dire qu'elle dévie le mauvais œil et protège celui qui possède sa tête coupée comme Persée.


Léonard de Vinci aurait peint deux tableaux de Méduse, mais qui ont disparu et on a seulement. On a seulement quelques descriptions de ces tableaux, quelques descriptions écrites aujourd'hui, mais ces deux tableaux auraient inspiré de nombreux artistes de la Renaissance. C'est au XIXᵉ siècle que le mythe change un peu. Il séduit les romantiques. Il y voit un rapport conflictuel entre masculin et féminin.


Ils font de Méduse l'archétype de la femme fatale, envoutante et donc forcément dangereuse pour les hommes. C'est en 1975 que l'inversion se fait totalement avec L'autrice Hélène Cixous qui inverse cette tendance dans un célèbre essai qui s'appelle Le Rire de la méduse et qui fait du personnage une icône féministe. Elle prend le contrepied en disant que Méduse n'est pas effrayante, mais qu'elle est belle et souriante, donc elle renverse la vision que l'on peut avoir d'une méduse dangereuse, maléfique, et elle fait de Méduse vraiment un personnage et une représentante en quelque sorte, de la difficulté pour les femmes d'accéder à la parole publique et de la difficulté de se faire entendre.


En 2020, l'artiste argentin Luciano Gharbaoui s'inspire du personnage, en sculpte un et le pose devant la cour pénale de New-York où est jugé Harvey Weinstein. Et dans cette version, c'est inversée. En fait, c'est Méduse qui décapite Persée. Ce qui est fascinant chez Méduse, c'est que c'est une métaphore de la puissance visuelle de l'art. On ne peut pas la regarder en face comme dans le mythe, sinon on est transformé en pierre.


On ne peut pas la regarder dans les yeux et la seule manière de la voir, c'est de considérer son reflet ou sa représentation par l'art.
 

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